Forum Déchets 49


Le dossier FD49 "Les déchets hospitaliers"

Soigner la gestion de ses déchets, une obligation pour les hôpitaux

Les hôpitaux sont des lieux très fréquentés et l'activité y est intense. Les déchets ménagers qui en résultent sont variés, tout comme les déchets spécifiques au domaine de la santé qui comportent divers types de déchets spéciaux. Ces derniers sont régis par un important cadre législatif et font l'objet d'un suivi qui nécessite une organisation exemplaire. Particulièrement exigeants au niveau sanitaire, les hôpitaux se doivent de gérer leurs déchets de façon optimale.

La Suisse romande (Berne inclus) compte 74 hôpitaux de soins généraux et 66 cliniques spécialisées, pour un total suisse de respectivement 185 et 191. Selon l'Office fédéral de la statistique, cela correspondait en 2000, au niveau suisse, à plus de 14 millions de journées d'hospitalisation, soit à près de 2 par habitant. Environ 4 kg de déchets sont générés par journée d'hospitalisation, ce qui signifie qu'au niveau suisse, 56'000 tonnes de déchets sont produites annuellement dans le domaine de la santé.

Quels sont les déchets du domaine de la santé?

L'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP) définit les déchets médicaux comme "tous les déchets produits spécifiquement par les activités du secteur de la santé" et les classe en quatre groupes: les déchets urbains, ceux présentant un risque de contamination ou de blessure et les médicaments périmés, les déchets infectieux et les autres déchets spéciaux (radioactifs, métaux lourds, etc.)

Des déchets spéciaux à profusion

Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), environ 80% des déchets liés aux soins de santé ne sont pas dangereux, les 20% restants incluent du matériel infectieux, toxique ou radioactif. Les déchets infectieux (agents infectieux, déchets de malades, contaminés par le sang, d'animaux de laboratoire, etc.) et les déchets anatomiques constituent environ 15% des déchets liés au domaine de la santé. Les objets pointus et tranchants (seringues, scalpels, etc.) représentent 1% du total des déchets, les produits chimiques et pharmaceutiques (solvants, désinfectants, médicaments périmés) 3% et les produits les plus dangereux, à savoir les déchets génotoxiques (par exemple les produits cytotoxiques utilisés principalement pour le traitement du cancer), radioactifs ou à forte teneur en métaux lourds 1%.

 

Comment gérer les déchets spéciaux?

UAu niveau fédéral, les déchets du domaine de la santé sont classés sous le code 3270 selon l'ordonnance sur les mouvements des déchets spéciaux (ODS). Plusieurs cantons possèdent également leur propre directive (DCPE 572 sur "les déchets d'hôpitaux et de laboratoires" pour Vaud et la directive "élimination des déchets médicaux" pour Genève, par exemple). Selon l'ODS, tous les hôpitaux, comme toutes les autres entreprises qui remettent des déchets spéciaux sont appelés "remettants" et possèdent, à ce titre, un numéro d'identification. Les entreprises qui réceptionnent les déchets, appelées "preneurs", doivent quant à elles être au bénéfice d'une autorisation délivrée par le canton. Tous ces déchets doivent être accompagnés d'un document de suivi, qui permet aux autorités cantonales d'avoir une vision globale de la production et de l'élimination des déchets spéciaux. Le canton de Vaud, par exemple, a produit en 2001 environ 800 tonnes de déchets spéciaux provenant du domaine de la santé, contre 950 tonnes en 2000.La plupart des déchets spéciaux sont éliminés via la filière des sacs blancs et rouges dans le canton de Vaud. Genève, qui s'est basé sur les pratiques européennes, utlise pour le même type de déchets des sacs jaunes, réservant les sacs blancs et rouges pour les habits. Ces sacs ont soit un double emballage (sacs rouges et blancs) soit sont plus épais (sacs jaunes). Ils ne doivent être ni compactés ni stockés, mais envoyés rapidement en usine d'incinération pour ordures ménagères (UIOM). Les objets pointus et tranchants doivent être mis dans des conteneurs avant d'être brûlés. Dans le cas de l'Hôpital de Nyon, par exemple, les conteneurs sont cadenassés et seuls des employés formés manipulent ces déchets. Les déchets provenant du bloc opératoire sont conservés en congélateur et amenés à incinérer aux Cheneviers dans un véhicule frigorifique. Les autres déchets spéciaux comme les tubes néon, les acides ou encore les produits à forte teneur en métaux lourds sont éliminés via un centre agréé pour déchets spéciaux.Les transports de déchets spéciaux font l'objet de l'Ordonnance relative aux transports des marchandises dangereuses par route (SDR) (voir page "sponsor" pour plus de détails).

 

La filière des sacs blancs et rouges est utilisée dans le canton de Vaud pour tous les déchets médicaux à incinérer qui ne doivent pas être compactés.

Les déchets urbains et ceux issus des constructions

Le tableau ci-contre détaille, entre autres, les catégories de déchets urbains rencontrés par les Hôpitaux universitaires genevois (HUG). Chaque catégorie nécessite la mise en place d'un système de collecte et d'une filière de recyclage ou d'élimination. Au total, ce sont près de 36% des déchets qui sont recyclés. Aux HUG, le mobilier ou les ordinateurs obsolètes sont dans la mesure du possible réaffectés. Si ce n'est pas possible, les lits, armoires, ciseaux, pinces et autres sont récupérés par des organisations humanitaires ou d'aide au développement et envoyés à l'étranger.

On oublie souvent que les établissements hospitaliers doivent se rénover, voire s'agrandir et que ces travaux génèrent des déchets. Un centre comme le CHUV est en perpétuelle mutation. Ainsi, ces dernières années ont vu la rénovation de l'Institut de pathologie et la construction de la nouvelle policlinique médicale. Les urgences sont actuellement rénovées et une nouvelle maternité est en projet. Pour les années 2000 à 2002, ce sont environ 630 tonnes de déchets de chantier qui ont été générés annuellement (dont plus de 90% ont été recyclés).

Une gestion efficace des déchets nécessite une organisation interne développée et réfléchie. Plusieurs dispositions doivent être prises. Par exemple, les déchets provenant de services de maladies infectieuses doivent être stérilisés avant conditionnement. La sensibilisation des employés est donc très importante, car une gestion performante des déchets dépend en grande partie d'eux. Dans le cas de l'Hôpital de Nyon, par exemple, des documents ont été préparés, des supports photo (ou pictogrammes) sont utilisés dans les services afin d'informer le personnel. Tous les nouveaux employés suivent un jour de cours de sensibilisation aux problèmes de sécurité et aux déchets. Aux HUG, la journée d'accueil est accompagnée de cours de formation interne. De plus, des fiches de présentation par déchet, donnant toutes les indications pour l'évacuation, sont disponibles sur le site internet. Les agents techniques des établissements médicaux de Suisse romande se sont regroupés au sein de l'Association romande des agents techniques hospitaliers (arath). Cette association permet un échange de connaissances et l'organisation de cours.

Les HUG ont mis en place un système de gestion des déchets performant. Plus de 20 catégories sont triées et environ 36% des déchets recyclés.

Les risques liés à une mauvaise gestion

L'Organisation mondiale de la santé estime que les pays développés peuvent produire jusqu'à 6 kg de déchets dangereux liés au domaine de la santé, par personne et par an. Cette quantité est réduite entre 0.5 à 3 kg pour les autres pays. Elle estime également que 8 à 16 millions de cas d'infection par le virus de l'hépatite B, 2,3 à 4,7 millions de cas d'infection par le virus de l'hépatite C et 80'000 à 160'000 cas d'infection par le VIH sont provoqués, chaque année, par la réutilisation de seringues non stérilisées. Une forme bénigne de la variole a été diagnostiquée chez des enfants qui avaient joué avec des ampoules de verre contenant des doses de vaccins périmés et l'exposition à des déchets radioactifs a causé la mort de plusieurs personnes dans différents pays. Les risques associés à une mauvaise élimination sont la contamination des eaux de boisson et l'émission de polluants dans l'atmosphère.

(source: www.who.int, 2003)

Perspectives

Ces dernières années, les HUG ont mis en évidence une augmentation de la quantité de déchets de 16% entre 1997 et 2002. Deux facteurs importants sont à prendre en compte. Premièrement, de plus en plus de patients sont traités de façon ambulatoire, ce qui génère une quantité de déchets supérieure par journée d'hospitalisation. Deuxièmement, les exigences sanitaires (Odim: Ordonnance sur les dispositifs médicaux) et de rentabilité influencent la politique des établissements et en particulier la politique d'achats. Ainsi, ces dernières années ont vu la prolifération des matériaux à usage unique (par exemple pousse-savon en plastique, plutôt que rechargeables). Apparemment meilleur marché, car limitant la main-d'œuvre nécessaire à la stérilisation, ils augmentent la quantité de déchets à évacuer à la fin de chaque mois. L'Hôpital de Morges a noté une augmentation des achats dans le secteur du matériel unique de Fr. 450'000. à plus d'un million par année entre 1994 et 2001. La crise de la vache folle, par exemple, a entraîné des mesures d'urgence. L'apparition des risques liés au prion (vache folle) a engendré une augmentation des mesures de protection (désinfection, stérilisation, etc.). Limiter la production de déchets ne fait pas partie des préoccupations principales des hôpitaux soumis à toutes sortes de contraintes inhérentes à leur activité. Des efforts sont néanmoins entrepris aux HUG afin de limiter la prolifération des emballages. De plus, la prise en compte de critères de recyclabilité dans la politique d'achat devrait permettre, à terme, d'augmenter la part de déchets recyclés.

Yves Loerincik
BIRD, Prilly

Statistique déchets pour les Hôpitaux universitaires genevois
Année de référence: 2002

Déchets
Recyclage

Quantités (t)

Déchets
Elimination

Quantités (t)

verre alimentaire

bains de radiologie

papiers/journaux

cartons

plastiques

métaux

bois

lavures

bouteilles PET

tubes fluorescents

déchets organiques

huile végétale

tissus usagés

cartouches de toner

matériel électronique

piles électriques

33.8

57.2

90.4

329.4

6.9

128.6

67.7

295.0

10.2

3.2

89.0

6.0

2.7

3.1

29.4

2.1

odures ménagères

déchets médicaux

plastiques

déchets spéciaux

déchets imputrescibles

déchets radioactifs

1947.2

390.5

24.6

17.9

79.7

1.9

Les Hôpitaux universitaires genevois totalisent 3616.5 tonnes de déchets. Ils recylent plus de 16 catégories de déchets.

source: http://www.hug-ge.ch/hygiene

 

Pour en savoir plus

Aide à l'exécution pour l'élimination des déchets médicaux: le fichier pdf du projet de l'OFEFP (mai 2001) peut être téléchargé en tapant: http://www.buwal.ch/abfall/docu/pdf/medrl_f.pdf

Identification des dangers pour la santé du personnel chargé de l'élimination des déchets hospitaliers: Cristina Costache, Institut universitaire romand de Santé au Travail, 1998

En français:
www.arath.ch

www.hug-ge.ch/hygiene

En anglais:

www.nf-2000.org
www.healthcarewaste.org www.who.int/water_sanitation_health/Environmental_sanit/

Fiche thématique N° 11 sur les déchets spéciaux (en français): à commander auprès de PUSCH, CP 211, 8024 Zurich, www.umweltschutz.ch

Le N° 47 de "Forum Déchets" traite des médicaments

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mis à jour le
21.06.2019