|
|
Le dossier FD 37 "Littering"
|
|
Un
anglicisme qui s'infiltre
partout
Qui n'a pas gardé dans
ses souvenirs un beau paysage
à l'horizon, un coin
agréable pour un
pique-nique qui, une fois sur
place, a perdu de son charme en
raison des détritus
oubliés par des
précédents
visiteurs négligents?
Mégots de cigarettes,
tessons de verre, emballages,
restes de repas. L'action de
jeter ses détritus dans
les lieux publics et les espaces
d'activités est une
incivilité qui peut se
traduire par un seul mot:
littering.
|
|
La Suisse a la réputation
d'être le pays aux rues
étincelantes de propreté.
Une image qui a tendance à se
ternir depuis une vingtaine
d'années, comme l'a confirmé
le service de la voirie de Lausanne. Avec
les mêmes effectifs et les
mêmes moyens financiers, la centaine
d'employés chargés du
nettoyage des rues de la ville à la
cadence journalière (deux fois par
jour au centre ville) ne peuvent plus que
parer au plus pressé.
Pour assurer des rues propres comme
elles l'étaient il y a deux
décennies, il faudrait une
présence permanente. Dans les
quartiers où la vie nocturne bat
son plein, les employés de la
voirie sont à l'oeuvre dès 5
heures du matin pour offrir au travailleur
ou promeneur matinal des rues exemptes de
tout immondice.
Dans les parcs, les employés
d'autres services s'évertuent
à maintenir leur lieu de travail le
plus accueillant possible. Pourtant un
enfant âgé d'un an
laissé libre de ses mouvements au
milieu d'un de ces parcs aura vite fait de
trouver un nombre considérable de
mégots, bouchons de bouteille ou
autres chewing-gums, si bien
adaptés à la taille de ses
doigts et si appétissants.
Un stress que bien des parents
aimeraient pouvoir éviter, mais que
seule une attitude plus civique des
citoyens pourrait permettre.
|
|
Plastique
et papier: indispensables mais
encombrants
Souvent les emballages sont
cités comme étant les objets
les plus jetés dans la nature. Car
s'il est vrai que le consommateur paie
pour le contenu, le contenant est
considéré comme offert,
avant ou après la caisse. Et on
s'en débarasse au plus vite sans
attendre la prochaine poubelle.
Abandonnés, ces emballages font
taches dans l'environnement durant des
mois, voire des années. Il faut du
soleil pour qu'ils se fragmentent,
finissent en poussière et
disparaissent enfin. Mais à l'abri
de la lumière et de
l'oxygène, le sac en plastique le
plus léger (8 micromètres
d'épaisseur) restera intact pendant
plus d'un siècle.
Pendant qu'il effectuait le Paris
Dakar, un directeur de chaîne de
supermarchés français a
été écoeuré
par la vue de sacs plastiques sur des
dizaines de kilomètres autour des
oasis. Tous ces plastiques ne sont pas les
conséquences du littering à
proprement parler. Ils peuvent aussi
s'être envolés à
partir de décharges.
Mais cet exemple montre qu'aucun pays
n'est épargné par la
prolifération de détritus
sur le domaine public, que ce soient dans
les rues, aux abords des restaurants de
cuisine rapide, sur les places ou plages,
aux sommets des montagnes...
Avec le plastique, le papier est lui
aussi partout. Affiches, photos,
confettis, boîtes d'allumettes,
billets d'avion, on a presque
oublié son importance et c'est sous
sa forme la plus dérisoire, sous
son aspect de détritus que sa
présence redevient visible:
prospectus, sachets
déchirés, vieux emballages,
lambeaux d'affiches, papiers gras et de
bonbons, tracts abandonnés, on le
met en boule, on le jette, il traîne
sur les trottoirs, il fait
désordre.
La durée
de vie des déchets dans la
nature
|
Mouchoirs en papier
Journal
Allumettes
Mégots de
cigarettes
Chewing gum
Peau de fruits
Briquet en plastique
Boîte en aluminium
Sac ou gobelet en
plastique
Polystyrène
expansé
Carte
téléphonique
Verre
|
3 mois
3 à 12 mois
6 mois
1 à 5 ans
5 ans
3 mois à 2 ans
100 ans
100-500 ans
100-1000 ans
1000 ans
1000 ans
4000 ans
|
Les détritus ont
des durées de vie
variables selon leurs
constituants et les conditions
atomosphériques auxquelles
ils sont soumis. Mais des
dizaines d'années sont
souvent nécessaires
à leur dégradation
naturelle.
|
|
|
Des
études pour trouver des
solutions.
En 1999 en Allemagne, une étude
a été menée afin
d'évaluer la saleté des
centres-villes, zones de loisirs et rues.
Sous mandat de la Communauté de
travail Emballage et Environnement (AGVU),
les contrôleurs de la
société technique de
surveillance de la région
Rhin-Westphalie (RWTÜV) ont
examiné 590 lieux publics.
Leurs conclusions sont que les
emballages (voir infographie)
représentent moins de la
moitié des déchets des lieux
analysés et que, vu le nombre
élevé des différents
types de déchets rencontrés,
des pressions sur un marché
particulier, par exemple celui des
emballages de boissons, ne se justifient
pas.
Le TÜV conseille de plutôt
prendre des mesures globales, tels que la
mise sur pied par les communes et les
entreprises privées, de programmes
de sensibilisation et de motivation, pour
changer le comportement de la population.
Il propose aussi une augmentation du
nombre de poubelles, et un durcissement de
la pénalisation liée aux
incivilités...
|
Une étude a
été
menée en
Allemagne afin de
caractériser les
détritus types
retrouvés dans
les lieux publics.
L'industrie de
l'emballage de boissons
a désiré
montrer que ses produits
ne devaient pas
être les seuls mis
en cause. Source:
communiqué de
presse du 14 avril 1999,
de la Communauté
de travail emballage et
environnement
(AGVU).
|
|
En Suisse, l'Ecocentre de Berne a
été chargé par la
division "déchets" de l'Office
fédéral de l'environnement,
des forêts et du paysage (OFEFP)
d'élaborer des mesures aptes
à prévenir la pollution des
agglomérations par les
détritus. Il a mené une
enquête auprès des communes
de l'Union des villes suisses sur ce
thème et a élaboré un
catalogue de mesures qui pourra servir de
base de campagne aux villes
intéressées.
|
|
Plutôt
la sensibilisation que les
sanctions
Quatre niveaux d'interventions ont
été définis:
- les campagnes permettent de
sensibiliser les groupes-cibles
à la thématique et de les
motiver à agir. Le ton doit
être plaisant et non
moralisateur.
- les projets peuvent encourager des
classes d'écoles, groupes ou des
individus à réaliser des
programmes créatifs.
- les infrastructures (poubelles ou
cendriers) et la logistique
nécessaire à leur
entretien doivent être
analysées et
éventuellement
complétées ou
remaniées.
- les sanctions ont parfois des
effets rapides mais elles ne sont pas
motivantes. De plus, seule une
population bien informée peut
comprendre la nécessité
des sanctions.
|
"Jeter à la
poubelle" est un jeu et
non une corvée
pour les enfants. Il
faut en profiter pour
promouvoir ce geste
coutumier dès le
plus jeune
âge.
|
|
Tout comme la Suisse, Singapoure a la
réputation d'être une ville
propre. Mais pour maintenir la
propreté elle a choisi d'appliquer
des lois très sévères
contre le littering. Les contrevenants
doivent payer des amendes salées
(1000 $S, 990 francs suisses), qui sont
doublées en cas de récidive
et accompagnées d'une peine
d'utilité publique.
|
|
Un
problème collant: le
chewing-gum
L'importation, la vente et la
possession de chewing-gums est interdite.
Cette règle a été
introduite suite à des arrêts
intempestifs de trains rapides dus
à des chewing-gums collés au
niveau des fermetures des portes.
En Suisse aussi les chewing-gums posent
des problèmes. Aux endroits les
plus collants, on peut compter
jusqu'à 200 pièces par
mètre carré. Des machines
existent pour en venir à bout.
Selon un article de "24 Heures" paru le
samedi 14 avril, 80 villes
françaises sont
équipées pour combattre ce
fléau.
Mais le problème est que
développer des solutions pour
réparer les dégâts ne
pousse pas à lutter contre les
causes. Bien au contraire, le sentiment
qu'un remède technique soulagera
les effets de leur comportement, offre aux
personnes concernées une raison
supplémentaire à leur
démobilisation et tranquillise leur
conscience.
Pourtant tout comme pour le littering
en général, il est
primordial que la population
réalise les conséquences de
ces petites actions peu civiques. Les
rues, les places et les parcs font partie
du domaine public. Ils sont la
propriété de tous et ce sont
les impôts de tout un chacun qui
financent leur entretien. Des
dépenses qui seraient certainement
plus utiles ailleurs.
|
|
Hygiène
personnelle et propreté des
lieux
Alors que des enquêtes sur
l'hygiène personnelle des
Européens se lisent
régulièrement dans les
médias, celles concernant la
perception de la propreté dans les
lieux qu'ils fréquentent sont plus
rares. Mais une enquête
française montre que la
propreté des lieux constitue un
élément essentiel de la
qualité de vie.
Il en ressort que même chez les
plus jeunes qui ont tendance à
avoir besoin de laisser leurs marques et
à qui cela ne déplaît
pas de donner du travail aux autres,
beaucoup sont gênés par
l'absence de propreté.
Rien n'est
désespéré et si la
Suisse veut conserver sa
réputation, aussi importante pour
son image de marque et le tourisme qui en
découle que pour l'environnement,
il faut que tous les acteurs
s'investissent: les citoyens bien entendu
mais aussi les communes, les cantons, les
producteurs d'objets, qui en fin de vie se
transforment en détritus
(emballages, cigarettes, journaux, etc),
les services précurseurs de
détritus (restauration rapide).
|
Par le
théâtre de
performance, la
fondation PUSCH veut
provoquer une prise de
conscience parmi les
utilisateurs de
l'environnement urbain
sans tomber dans le
moralisme ou le
rabâchage.
Dès le mois de
juin 2001, des artistes
interviendront dans tous
les coins de la Suisse
sur demande des villes.
Les comédiens
incarneront des figures
mythiques et
transmettront une vision
positive de
l'environnement aux
badauds afin de les
inciter à
respecter, voir
améliorer
l'espace appartenant
à tous.
|
|
La Campagne nationale "Espace pour toi,
espace pour nous", initiée par la
fondation pour la pratique
environnementale en Suisse (PUSCH)
au printemps 2001, est un premier pas dans
cette direction. Souhaitons-lui un franc
succès.
Anne-Claude Imhoff
BIRD, Prilly
|
|
|
Pour en savoir plus
|
|
|