Longtemps, le compostage en bord de champ a
divisé l'opinion. Ses partisans vouaient le
compostage centralisé aux gémonies
à cause du trafic, de la pollution, des
mauvaises odeurs. Ses détracteurs
prétendaient qu'on ne pouvait produire du
compost de qualité, exempt de germes
pathogènes et de graines d'adventices, que
dans une installation centralisée de grande
capacité. Qu'en est-il? Contrairement aux
attentes, le compostage en bord de champ est aussi
coûteux que dans une installation
"industrielle" et les capacités sont
limitées par les besoins d'amendements des
champs voisins. En revanche, cette formule peut
être considérée comme plus
conforme aux objectifs du développement
durable.
Le principe de base du compostage en bord de
champ est simple: l'andain est déposé en
bordure du champ où il sera valorisé. On
parle aussi de compostage itinérant; dans ce
cas, tout nouvel andain au même endroit est
interdit avant trois ans. On évite ainsi les
problèmes de tassement et d'enrichissement
excessif du sol.
Les déchets verts sont
réceptionnés sur une place
sécurisée, en général
à la ferme, ou éventuellement à
un autre endroit stratégique de la commune.
Le
compostage en bord de champ peut être
une solution judicieuse, sous certaines
conditions.
Une installation de compostage en bord de champ
est habituellement exploitée par un ou
plusieurs paysans, parfois réunis en
communauté de travail, qui ont conclu une
convention avec la commune. Par définition, ce
système ne peut pas traiter des
quantités illimitées de déchets,
puisque ce sont les besoins en éléments
fertilisants des exploitants qui en sont le facteur
limitant.
Quand?
L'expérience a montré que la
taille critique est atteinte vers 500-600 tonnes/an,
soit la production d'une population d'environ 6 000
habitants. Pour rentabiliser les investissements, la
capacité ne devrait en aucun cas être
inférieure à 100 t/an. Ce système
convient donc pour des communes de 1 000 à 6
000 habitants.
Combien
ça coûte?
Avant d'autoriser ce système, un essai
pilote a été conduit en Singine, pour
vérifier les conditions techniques minimales
et, surtout, pour établir le prix de revient
réel selon les tarifs FAT.
Le résultat a été clair: le
prix de revient est égal, voire
légèrement supérieur, à
celui de la compostière régionale de
Galmiz, à savoir Fr. 120.- par tonne de compost
produit.
L'a priori selon lequel le compostage en bord
de champ ne coûte presque rien, ou qu'il est
nettement meilleur marché que le compostage
centralisé, est donc totalement faux.
Quel
intérêt?
Pour la commune:
les dépenses constituent un revenu
annexe pour un ou plusieurs agriculteurs qui sont
également des contribuables;
la proximité avec les exploitants
améliore la qualité des services.
Pour les agriculteurs:
les indemnités constituent un revenu
accessoire intéressant pour des exploitations
qui peuvent difficilement se diversifier;
en valorisant le compost qu'ils ont produit,
ils disposent d'une assurance qualité
irréprochable.
Pour les citoyens:
ils peuvent (re)créer le lien entre le
produit brut et le produit fini;
les contacts avec les agriculteurs
s'améliorent.
Le compostage en bord de champ représente
donc une solution intéressante, qui
nécessite une coordination intensive entre les
acteurs concernés et des contrôles
très suivis.
Pierre-Alain Loup, Office de protection de
l'environnement
du canton de Fribourg, Section déchets et
sites contaminés
Route de la Fonderie 2, 1700 Fribourg
tél. 026/305 37 77, fax 026/305 10 02
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