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déchets: Votre entreprise a
déjà dû traiter des cas de terrains
pollués. Faut-il s'attendre à des
"surprises" de plus en plus fréquentes?
M. Moinat: Ces surprises
ont toujours existé, mais la directive
fédérale sur les matériaux
d'excavation ne date que de 1999. Il est certain que son
application conditionne notre travail. Le "maillage
réglementaire" toujours plus fin fonctionnera
comme un crible laissant passer de moins en moins de
choses. Dès qu'il y a eu une activité
anthropique, il faut procéder à des
investigations. On peut estimer, par exemple, qu'une
vieille citerne enterrée sur trois a connu des
fuites. Partant de là, je peux dire que dans 10%
des chantiers nous nous trouvons confrontés
à des pollutions plus ou moins importantes.
FD: Comment identifier
les terres polluées et quels dispositifs doivent
être mis en place le cas échéant?
M. Moinat: En attendant
l'achèvement du cadastre des sites
contaminés, l'identification des problèmes
relève de l'observation et de l'instinct! Les
pollutions aux hydrocarbures sont visibles et se
confirment aisément par l'odorat. Il en va tout
différemment des pollutions aux métaux
lourds! Lorsqu'un désordre du terrain
apparaît (ndlr: ce qui arrive s'il y a eu
comblement), la méfiance est de rigueur. En cas de
pollution confirmée, c'est la procédure
propre aux déchets spéciaux qui s'applique:
l'avance est ralentie, tout transport fait l'objet d'un
bulletin de suivi. Il faut dire que chaque tonne peut
coûter cher: de 120.&endash; à 300.&endash;
francs, soit jusqu'à 10 à 30 fois plus que
pour des matériaux non souillés!
Une contamination aux métaux
lourds ne sera révélée que par
des analyses. L'entrepreneur doit être attentif
au genre d'activités qui se sont
déroulées au fil des décennies
et, le cas échéant, exiger les analyses
qui pourraient s'imposer.
FD: Et que deviennent les
terres polluées? Dispose-t-on des installations
adéquates?
M. Moinat: Dans bien des
cas, le degré de pollution est suffisamment faible
pour qu'une mise en décharge
contrôlée soit autorisée. Pour les
cas plus graves, nous nous trouvons démunis. Il
faut se rappeler que, pour la Suisse romande, les seules
décharges bioactives disposant pour cela de
casiers sont Châtel-Saint-Denis et Teuftal. Nous
devons souvent faire appel à des entreprises
suisses alémaniques, voire à des solutions
d'exportation à l'étranger. Ainsi, avec un
partenaire, nous projetons de nous équiper
prochainement afin d'offrir à nos clients des
solutions conformes et à prix
compétitifs.
FD: SOTRAG est-elle
"victime" des nouvelles dispositions légales ou,
au contraire, intéressée par un
énorme marché?
M. Moinat: Si nous
enterrions des matériaux pollués dans nos
décharges, c'est nous qui devrions supporter des
frais d'assainissement à la place de nos clients!
Nous voulons absolument éviter d'être
victimes. Quant au marché de cinq milliards de
francs auquel il est fait référence, je
considère qu'il reste aujourd'hui plus virtuel que
profitable. Les dépollutions coûtent
très cher et chacun des intervenants de la
construction se voit imposer "devoir et
responsabilité". Pour évoluer rapidement,
il faudra surtout beaucoup de solidarité et un peu
de concurrence.
Raymond Moinat, directeur
SOTRAG SA, CH-1163 Etoy
tél. 021/821 40 01, fax 021/821 40
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