Beaucoup se souviennent de l'affaire Elude, une société qui, à Develier (JU), devait propulser la Suisse au rang de pionnier dans le recyclage high-tech des pneus usagés. Les carcasses congelées à l'azote liquide étaient broyées comme du verre et transformées en acier, tissu et poudrette ultra-fine de caoutchouc. Faute de pouvoir vendre la poudrette à un prix supérieur au coût du traitement, l'entreprise a fait faillite en 1996, laissant sur place un tas de pneus de plusieurs centaines de tonnes.

Suite à cette mésaventure, l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage n'entend pas soutenir de si tôt un projet de recyclage "matière" des pneus usagés en Suisse et mise essentiellement sur les cimentiers pour leur élimination. Incontournables, les cimentiers sont-ils vraiment des partenaires fiables à long terme? Même à 90.&endash; francs la tonne, l'incinération des pneus n'est pas des plus rentables et les nouvelles normes européennes concernant les émissions des cimenteries risquent d'en restreindre l'utilisation. Lors d'une récente conférence internationale, le directeur d'une usine française du groupe HCB déclarait: "Globalement, la filière [en cimenterie] n'est à utiliser que lorsque toutes les autres possibilités de valorisation ont été épuisées". L'Europe se tourne donc vers la valorisation "matière". Elle a ainsi recyclé un pneu sur cinq en 1998.

L'enquête menée par forum déchets a permis d'identifier pas moins de trois projets de recyclage en Suisse romande. Mais aucun ne trouve les appuis politiques nécessaires. Ne faudrait-il pas rouvrir le dossier?

Anne-Claude Imhoff

BIRD, Prilly