Depuis la première lampe d'Edison en 1879 (un
filament de carbone dans un bulbe sous vide), on a
développé une très grande
variété de sources lumineuses. Les lampes
à incandescence &endash; qui comprennent les
lampes halogènes &endash; ont un filament en
tungstène dans une ambiance de gaz rare (azote,
argon ou krypton). Porté à des
températures de quelques milliers de
degrés, le filament devient incandescent et se
vaporise lentement. Dans les lampes halogènes, les
vapeurs de tungstène se combinent avec
l'halogène (de l'iode) pour se redéposer
sur le filament au lieu d'aller noircir le verre
(quartz). L'élimination des lampes à
incandescence avec les ordures ménagères ne
pose pas de problème.
Utilisation de
mercure en Suisse (tonnes par
an)
|
86
|
90
|
99
|
99
|
Piles
|
12
|
3-4
|
1
|
20%
|
Industrie chimique
|
2
|
2
|
2
|
40%
|
Amalgames dentaires
|
1,7
|
1,4
|
<0,9
|
18%
|
Thermomètres
|
1
|
0,8
|
<0,1
|
2 %
|
Agriculture (fongicide pour
semences)
|
0,5
|
0,04
|
?
|
1 %
|
Lampes fluorescentes
|
0,25
|
0,25
|
0,25
|
5 %
|
Médicaments
|
0,2
|
0,2
|
?
|
4 %
|
Autres utilisations
|
2
|
2
|
<0,5
|
10 %
|
Total
|
env. 20
|
env. 10
|
env. 5
|
100 %
|
Les lampes à décharge n'ont pas de
filament, mais des électrodes qui font
éclater une décharge électrique
(sorte d'éclair) dans un gaz contenant des vapeurs
de sodium, de mercure, d'hydrogène ou de
xénon. Les lampes à vapeur de mercure,
utilisées notamment pour l'éclairage
public, sont des déchets spéciaux.
Indispensable,
le mercure peut être réduit au
minimum
Les lampes fluorescentes (tubes "néons" et
lampes fluocompactes) sont des lampes à
décharge dans lesquelles le mercure émet
des ultraviolets que la couche fluorescente transforme en
rayonnement visible (voir schéma). Un tube
fluorescent normal contient entre 20 et 30 mg de mercure.
Mais il est possible de doser la quantité de
mercure au stricte nécessaire, soit environ 3 mg
pour un tube de dimension standard.
Code
ODS 3211: de 3'600.&endash; à 8'200.&endash;
francs la tonne
C'est essentiellement à cause du mercure
qu'elles contiennent que les lampes fluorescentes sont
soumises à l'ordonnance sur les mouvements de
déchets spéciaux (ODS). Depuis
l'étude sur le mercure en Suisse (OFEFP, 1988),
l'utilisation de mercure a été
divisée par quatre et les lampes fluorescentes
n'en représentent pas 10% (voir tableau). Les
sources industrielles étant sous contrôle,
ce sont principalement les UIOM qui rejettent du mercure
(2/3 des émissions). Entièrement
vaporisé dans le four, le mercure gazeux traverse
sans difficulté les électrofiltres et les
laveurs de fumées.
Soumis à un très
fort champ électrique, l'atome de mercure va
voir un de ses électrons changer de niveau
d'énergie, engendrant un rayonnement
ultraviolet (UV, invisible). Ce sont les poudres
fluorescentes qui transformeront ce rayonnement UV en
lumière visible. Sans un minimum de mercure (3
mg par tube), le système ne peut pas
fonctionner.
Les installations de recyclage des lampes
fluorescentes fonctionnent, elles, sous aspiration et le
mercure gazeux qui s'en échappe est fixé
sur des filtres à charbon actif. Traités
pièce après pièce, les tubes sont
d'abord découpés aux
extrémités, les poudres fluorescentes et le
mercure qu'elles contiennent sont soufflées dans
des conteneurs étanches. Le verre et les
métaux (aluminium, laiton) subissent encore un
nettoyage pyrolytique de démercurisation pour les
rendre propres au recyclage. Ces opérations
successives coûtent cher: Fr. 0,90 pour un tube
standard, Fr. 8,20/kg pour une enseigne lumineuse (teneur
en mercure nettement plus élevée).
Recyclage
des poudres fluorescentes et du mercure: le plus dur
reste à faire
Dans les tubes fluorescents classiques, la poudre
fluorescente est principalement composée de
calcium et d'antimoine. Cette composition varie d'un
fabricant à l'autre et leur réutilisation
pour la fabrication de nouveaux tubes est impossible.
Comme elles contiennent l'essentiel du mercure, les
poudres extraites par les installations de recyclage sont
principalement mises en décharge souterraine
(anciennes mines de sel allemandes). L'entreprise SOVAG,
qui exploite une telle installation à Rubigen
(BE), déclare distiller ses poudres et en
récupérer le mercure, tout en admettant que
cette opération n'est pas justifiée du
point de vue économique. Pourtant, la
société canadienne FLR se dit en mesure de
valoriser les poudres démercurisées dans la
fabrication de pigments pour la peinture et les
matières plastiques.
On mesure l'efficacité d'une source
lumineuse en lumen par watt. Les lampes à
décharge ou lampes fluorescentes sont de
loin les plus performantes:
lampe à incandescence 12
lm/W
lampe halogène 17
lm/W
lampe fluocompacte 60 lm/W
tube fluorescent 75 lm/W
tube nouvelle
génération 100 lm/W
Toutefois, le rendu des couleurs et la
qualité de la lumière peuvent
fortement varier. Parfois au détriment de
l'efficacité
énergétique.
En outre, l'efficacité se
dégrade dans le temps: noircissement du
verre, oxydation des filaments, etc. Après
10000 h, un tube fluorescent ordinaire a perdu 30%
de son efficacité, tandis qu'un tube
nouvelle génération n'a faibli que de
10% et pourra donc être utilisé
nettement plus longtemps.
En définitive, l'opération de
"recyclage" des lampes fluorescentes consiste à
récupérer un peu de verre, d'aluminium et
de laiton (97% du tube) et à mettre en
décharge les produits toxiques, tout comme les
filtres à charbon actif chargés de
mercure.
Jusqu'à
douze tubes fluorescents, l'ODS ferme (provisoirement)
les yeux
Le taux de collecte des tubes fluorescents demeure
faible: moins de 60%. Cela peut s'expliquer en partie du
fait de l'étrange limite de l'ODS qui
précise qu'aucun document de suivi n'est exigible
pour moins de 12 tubes. Mais il est faut d'en
déduire qu'une lampe isolée n'est pas un
déchet spécial. Quoi qu'il en soit, cette
limite devrait disparaître lors de la prochaine
révision de l'ODS en 2001.
Pour l'heure, ce sont principalement les gros
utilisateurs de lampes fluorescentes qui assurent
l'approvisionnement des trois installations suisses de
traitement (4,5 millions d'unités). Les communes,
pour leur part, ne collectent qu'un million de
pièces. Finalement, 2,5 millions de tubes
fluorescents sont incinérés.
Pas
d'obligation de reprise, pas de taxe anticipée
de recyclage, pas soumis à
l'OREA
Le retour au fournisseur serait certainement la
solution la plus simple pour l'utilisateur. Pour le
particulier, stocker un tube ou une lampe fluocompacte
dans l'attente de la journée annuelle de collecte
des déchets spéciaux ménagers
présente des risques. Et prendre sa voiture pour
se rendre à la déchetterie régionale
n'est pas écologiquement favorable.
Mais les tubes fluorescents font
expressément partie de la liste des accessoires
fonctionnant à l'électricité, et qui
échappent à l'ordonnance sur la
restitution, la reprise et l'élimination des
appareils électriques et électroniques
(OREA). Ainsi, la Confédération n'a pas
l'intention d'imposer une reprise ou une taxe
anticipée d'élimination. Le problème
ne constitue plus une priorité de protection de
l'environnement. En effet, la teneur en mercure de ces
produits a considérablement baissé. A
l'occasion de la 4e Conférence
paneuropéenne des ministres de l'environnement
à Aarhus, la Suisse a signé en 1998 un
protocole sur la protection de l'air par lequel elle
s'engageait entre autre à réduire de 20%
avant 2010 ses émissions de mercure par rapport
à 1990. Le Conseiller fédéral Moritz
Leuenberger pouvait signer cet engagement sans crainte,
puisque cet objectif était déjà
largement atteint à cette date.
Les "néons" ne
constituent qu'une variété dans la
famille des lampes fluorescentes. Les lampes
fluocompactes prennent toutes sortes de formes et leur
démontage reste essentiellement
manuel.
Il faut encore relever que plusieurs autres composants
toxiques ont été éliminés
(arsenic, cadmium, ...) de la fabrication des lampes
fluorescentes. Ainsi, Berne considère que
l'état de la technique ne permet pas de faire plus
en faveur de l'environnement moyennant un coût
"supportable".
Refaire
des tubes avec des tubes: le défi
intéressé des
constructeurs
Les fabricants se doivent d'améliorer sans
cesse leurs produits. C'est ainsi qu'après avoir
réduit la teneur en produits problématiques
dans les lampes fluorescentes, Philips a
développé de nouveaux mélanges de
poudres: meilleure efficacité lumineuse, plus
durables, rendu des couleurs amélioré. Or,
ces poudres fluorescentes coûtent extrêmement
cher. Une bonne raison pour les récupérer
et les réutiliser. Philips a donc breveté
un système d'identification spectrométrique
des différents mélanges qu'il est possible
d'adapter sur les installations existantes de traitement
des tubes. Parallèlement, la célèbre
firme de Eindhoven s'engage à racheter et
réutiliser les poudres triées, le mercure
qu'elles contiennent et le verre des tubes (voir page 5).
Comme on pouvait s'y attendre, les autres principaux
fabricants (Osram, Sylvania et General Electric) lui ont
déjà emboîté le pas.
Nous voici donc confrontés à une
nouvelle problématique: la
récupération ne se justifie plus uniquement
en fonction d'impératifs de protection de
l'environnement, mais par la nécessité
économique de réintégrer certaines
matières dans le cycle de production. C'est ici
que s'arrêtent les politiques contraignantes en
matière de protection de l'environnement et que
l'on entre dans la logique du développement
durable. Reste à savoir si les consommateurs
seront sensibles à la démarche et voudront
bien payer à l'achat le surcoût d'une
solution de recyclage globalement nettement plus
favorable.
Sébastien Piguet
BIRD, Prilly
Pour en savoir
plus
ENTREPRISES DE
TRAITEMENT:
SM Recycling, 5000 Aarau (AG)
p.a.Beat Zweili
1305 Penthalaz (VD)
tél. 021/861 05 77,www.smrecycling.ch
Sovag AG
Im Kieswerk, 3113 Rubigen (BE)
tél. 031/721 33 92, www.sovag.ch
RecybatExpress SA (ex-Recymet)
Centre Avila, 1123 Aclens (VD)
tél. 021/869 81 31, www.recymet.ch
FLR Fluorescent Lamp Recyclers
Cambridge (Ontario, Canada)
www.contech.ca/FLRproc.htm
ENERGIE/DESIGN:
Agence suisse pour l'efficacité
énergétique (S.A.F.E.)
http://energieagentur.ch
POLLUTION AU
MERCURE:
Agence canadienne pour la protection de
l'environnement (EPA)
www.epa.gov/toxteam/hg_conf.htm
Office fédéral de la protection de
l'environnement des forêts et du paysage
(OFEFP)
"Le mercure en Suisse", Cahiers de l'environnement
No 79, Berne, 1988
tél. 031/322 89 99